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La sonde Solar Orbiter de l’Esa et de la Nasa a été lancée avec succès le 10 février 2020 à destination du Soleil. Le satellite a pour mission d’étudier l’atmosphère et le vent solaires, et d’effectuer les toutes premières observations haute résolution des régions polaires de notre étoile. Analyse de la mission et des premiers résultats.
Conçue et développée par l’agence spatiale européenne (Esa) avec une forte participation de la Nasa, la sonde Solar Orbiter s’est envolée sans encombres vers le Soleil le 10 février 2020.
Lancé par une fusée Atlas V depuis le Kennedy Space Center de Cap Canaveral (Floride), le satellite d’observation dédié à l’étude du Soleil a atteint sa première orbite opérationnelle – une ellipse autour de notre étoile – et a effectué ses premières mesures en 2020. La mission devrait durer au moins jusqu’en 2026.
Au maximum, Solar Orbiter devrait s’approcher plus près de notre étoile que l’orbite de Mercure, à 42 millions de kilomètres de la surface solaire. Certes, cela tient moins du record que la sonde américaine Parker Solar Probe, qui devrait en 2024 se trouver plus proche que jamais du Soleil à environ six millions de kilomètres. Mais Solar Orbiter devrait tout de même être soumise à des températures atteignant les 520 °C, soit 13 fois plus que la chaleur endurée par les satellites en orbite autour de la Terre !
Or la sonde emporte dix instruments scientifiques. Pour pouvoir fonctionner dans ces conditions extrêmes, ces équipements doivent être protégés. Ils sont donc placés derrière un bouclier thermique très sophistiqué. « Notre équipe devra assurer l’orientation précise et continue du bouclier dans l’espace pour éviter de potentiels dégâts dus aux émissions solaires », analyse Sylvain Lodiot, responsable des opérations Solar Orbiter à l’Esa.
Le bouclier thermique de 3,1 par 2,4 mètres possède une structure en « sandwich ». Côté satellite, on trouve une base en aluminium, séparée par 25 centimètres de vide (couche nécessaire pour évacuer la chaleur vers l’espace) d’une partie supérieure en titane côté Soleil. Les très fines feuilles de titane, un matériau isolant, ont été conçues pour renvoyer le plus de chaleur possible.
De plus, la face exposée au Soleil est recouverte de phosphate de calcium. D’après l’agence spatiale américaine, cette matière noire obtenue à partir de poudre d’os carbonisés entre aussi dans la composition de pigments ayant notamment servi à la réalisation de peintures rupestres durant la Préhistoire.
Solar Orbiter va combiner ses dix instruments, dont neuf ont été conçus et fabriqués en Europe, pour observer les turbulences à la surface du Soleil, la haute atmosphère de notre étoile et les variations dans le vent solaire. D’une part, quatre équipements in situ vont mesurer les particules énergétiques et le champ magnétique émis par le Soleil au niveau de la sonde.
Transportés jusqu’à la Terre dans le vent solaire, ces éléments sont à l’origine des aurores polaires et de « tempêtes solaires », capables de perturber les réseaux électriques et de télécommunications. Les tempêtes peuvent avoir des conséquences sur le trafic aérien ou les échanges avec la Station spatiale internationale par exemple.
D’autre part, les six autres instruments travaillant à distance fourniront des images haute résolution de la surface et de l’atmosphère solaires – couronne qui atteint le million de degrés contre 5 500 °C pour la surface. Un des principaux objectifs de la mission est aussi de réaliser les premières observations de l’histoire des régions polaires de notre étoile. Bien qu’invisibles depuis la Terre ou aux autres satellites d’exploration, les pôles solaires seraient, d’après la communauté scientifique, une des clefs pour comprendre l’activité du Soleil.
« Toutes ces données vont nous fournir une vision inédite de la manière dont notre étoile fonctionne, notamment son cycle de 11 ans, et de comment le Soleil crée et contrôle la bulle magnétique – héliosphère – où se trouve la Terre », explique Daniel Müller, responsable scientifique de la mission Solar Orbiter à l’Esa.
La sonde Solar Orbiter a été conçue pour travailler de concert avec la mission Parker Solar Probe lancée en août 2018. Cette dernière étudie le vent solaire naissant puisqu’elle s’approche plus près du Soleil qu’aucune autre sonde auparavant. Fin janvier, elle a battu un record en orbitant à seulement 18,6 millions de kilomètres de la surface de notre étoile, affrontant des températures de plus de 600 °C !
Mais Parker Solar Probe ne possède pas de caméras. D’où la complémentarité avec Solar Orbiter qui se trouve à une distance idéale du Soleil pour à la fois effectuer des mesures in situ et recueillir des images. Solar Orbiter pourra ainsi apporter des éléments de contexte nécessaires à la compréhension des données recueillies par Parker Solar Probe.
Le 13 février 2020, les équipes de l’Esa ont reçu les premières données du magnétomètre. Cet instrument est en charge des mesures de champ magnétique, champ aux valeurs des milliers de fois inférieures à celles que l’on peut trouver sur Terre.
« Même les courants dans les fils électriques du satellite créent des champs magnétiques bien plus intenses que ceux que l’on cherche à mesurer », partage Tim Horbury, responsable scientifique du magnétomètre. « C’est pourquoi nos capteurs sont situés sur un bras – en dehors de l’habitacle principal – pour les éloigner de l’activité électrique de l’intérieur du satellite ».
Les capteurs qui ont recueilli des données avant, pendant et après le déploiement du bras montrent une décroissance du champ magnétique. Ceci est normal, puisque le magnétomètre s’est physiquement éloigné de l’activité électrique du cœur de la sonde. « C’est une confirmation que le bras s’est bien déployé et que les instruments nous enverront bien, dans le futur, des mesures scientifiques correctes« , conclut Tim Horbury.
Mesurer tout au long de l’ouverture du bras a permis aux scientifiques d’identifier et de caractériser les signaux qui ne sont pas directement liés au vent solaire, comme les perturbations en provenance de la plateforme du satellite ou des autres instruments. Finalement, ces premiers jours de vie en orbite sans aucun incident ont été de bon augure.
Les premières données recueillies par Solar Orbiter ont permis de déterminer la région source du vent solaire qui frappe la sonde, et d’identifier cette « empreinte » dans les images de télédétection.
De plus, de nouvelles informations sur de minuscules éruptions à la surface sur Soleil appelées « feux de camp » ont été obtenues. L’existence de ces éruptions était pressentie depuis longtemps, mais il n’y avait jusqu’à présent aucun moyen de détecter des événements aussi petits. Une découverte fondamentale, puisque ces mini éruptions seraient responsables de la montée en température de la couronne solaire.
En 2022, Solar Orbiter devrait se rapprocher à moins de 48 millions de kilomètres de la surface du Soleil, soit plus de 20 millions de kilomètres plus près qu’en 2021.
Article mis à jour en juin 2021.
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