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Dans la région de la constellation d’Orion se rassemblent un panel d’étoiles et d’objets faibles qui permettent de reconstituer le destin des étoiles, le temps d’une soirée d’observation.
Le temps des étoiles n’est pas celui des hommes : il est impossible à ces derniers de voir la naissance, l’évolution et la fin d’un seul et même astre, qui s’étale sur des millions, voire des milliards d’années. Mais grâce à la science qui a pu reconstituer cette chronologie, on sait que le ciel nous permet de voir, côte à côte, des étoiles aux différents stades de leur vie.
Voici un parcours reconstituant ces principales étapes dans le ciel d’automne-hiver, dans la région de la célèbre constellation d’Orion. La plupart des cibles proposées sont visibles à l’œil nu ou avec des jumelles, seules les nébuleuses NGC2392 et M1 sont à rechercher avec une lunette ou un télescope.
L’histoire des étoiles commence au cœur des nombreux nuages de gaz (essentiellement d’hydrogène) et de poussières que recèlent les galaxies. À la faveur de perturbations, il arrive que cette matière se concentre localement. La gravité aidant, la matière se condense toujours plus et s’échauffe pour former des protoétoiles puis, si celles-ci atteignent une masse suffisante, des étoiles lorsqu’une réaction de fusion nucléaire (l’hydrogène qui se transforme en hélium, en libérant de l’énergie) peut s’enclencher dans leur cœur.
La nébuleuse M42 dans la constellation d’Orion est un bel exemple de ces nuages de gaz et de poussières. En plein cœur s’y niche une pouponnière d’étoiles appelée le Trapèze, qui regroupe de très jeunes étoiles âgées d’environ 30 000 ans. Nées de l’effondrement sur eux-mêmes des gaz environnants, ces étoiles parmi les plus jeunes connues chauffent maintenant le gaz restant, le rendant lumineux.
La zone de la nébuleuse d’Orion se repère à l’œil nu sous un ciel noir : en fait on voit surtout les étoiles qui l’entourent. Mais à l’aide de jumelles, c’est bien la nébuleuse avec sa forme d’oiseau qu’on identifie. Avec une lunette ou un télescope, on peut rechercher en plein cœur la zone brillante où les étoiles du Trapèze se serrent. Celles-ci peuvent être vues individuellement en grossissant plus de 80 fois.
À consulter aussi : la fiche d’observation de M42 aux jumelles
Toutes les étoiles se forment ainsi, à la suite de l’effondrement d’un nuage de gaz. C’est ensuite que leur destin diverge, essentiellement en raison de leur masse. De manière générale, plus une étoile est massive, plus son espérance de vie est brève… Pour établir une classification, les scientifiques utilisent la masse de notre étoile, le Soleil, comme unité de mesure : on parle de masse solaire. À noter que pour devenir étoile, une protoétoile doit faire plus de 0,08 masse solaire.
Une fois que la réaction nucléaire en leur cœur est déclenchée, les étoiles entre 0,08 et 8 masses solaires restent longtemps dans un état stable : elles ont une quantité intéressante d’hydrogène à fusionner et, du fait de leur masse raisonnable, ne le font pas trop rapidement. Notre Soleil (seule étoile que vous ne verrez pas la nuit !) en est l’exemple parfait : déjà âgé d’environ 4,5 milliards d’années, on peut espérer qu’il brille encore à peu près autant de temps puisqu’il a brûlé seulement la moitié de son hydrogène.
Dans la région du ciel que nous explorons, Procyon, principale étoile de la constellation du Petit Chien et visible facilement à l’œil nu, est assez similaire au Soleil (1,5 masse solaire, de couleur blanc-jaune, température en surface 6 300 °C) mais son évolution est plus avancée. Procyon vient d’achever de consommer son hydrogène et alors qu’elle commence à fusionner son hélium (pour créer du carbone et de l’oxygène), elle est en train de se dilater pour devenir progressivement une géante rouge. Notez que la fusion de l’hélium n’est possible que dans les étoiles de plus de 0,5 masses solaires.
Pour voir une géante rouge, dernière étape avant la fin de vie des étoiles peu massives, localisez ensuite Aldébaran (1,2 masse solaire), qui représente l’œil de la constellation du Taureau. Cette étoile, qui a déjà consommé une grande partie de son hélium, est dilatée au point d’atteindre un diamètre de 45 fois celui du Soleil. Cette dilatation entraîne le refroidissement de sa surface qui n’est plus qu’à 3 600 °C environ, ce qui explique sa belle couleur orangée mieux reconnaissable aux jumelles. Elle restera à ce stade durant 100 à 200 millions d’années tout au plus.
Lorsque la combustion de l’hélium s’achève dans les étoiles de 0,5 à 8 masses solaires, les choses se précipitent : le cœur grossit, l’étoile devient instable et finit par expulser ses couches externes. Il se forme alors une nébuleuse planétaire, coquille gazeuse en expansion ayant souvent une forme ronde, d’où son nom. NGC2392, la nébuleuse du Clown à rechercher dans la constellation des Gémeaux en est l’exemple parfait : l’étoile qui en est à l’origine a expulsé ses couches externes il y a environ 10 000 ans. En son centre, on retrouve une naine blanche, vestige très dense et très chaud de l’étoile qui va se refroidir en quelques centaines de millions d’années.
L’observation de NGC2392 dans une lunette ou un petit télescope avec un grossissement d’au moins 100 fois permet de voir facilement la partie interne (la plus brillante) de la nébuleuse, ainsi que l’étoile centrale, la naine blanche, qui figure le nez du clown.
À consulter aussi : la fiche d’observation de NGC2392 à la lunette ou au télescope
Pour les étoiles de plus de 8 masses solaires, la période stable de combustion de l’hydrogène est bien plus brève : entre 50 et 100 millions d’années en moyenne.
Rigel (17 masses solaires), visible à l’œil nu dans la constellation d’Orion, en est un bon exemple. Cette étoile géante est blanc-bleue, une couleur qui indique qu’elle est très chaude (10 000 °C en surface). C’est l’un des astres les plus brillants connus : Rigel brille 40 000 fois plus que le Soleil ! Cette étoile dispose encore d’une bonne réserve d’hydrogène mais elle le brûlera très vite, en quelques dizaines de millions d’années tout au plus.
Rigel commencera alors à brûler son hélium et se dilatera pour devenir une supergéante rouge, comme Bételgeuse ! Cette dernière mesure environ 1 000 fois le diamètre du Soleil, alors qu’elle ne fait que 15 fois sa masse. Placée au milieu de notre Système solaire, elle engloberait les orbites de Mercure, la Terre, Mars et sa surface serait tout près de l’orbite de Jupiter ! Comme pour toutes les étoiles de plus de 8 masses solaires, il se produit des étapes de fusion supplémentaires car son cœur est plus dense et plus chaud : fusion de l’hélium en carbone et en oxygène, puis d’autres étapes encore. Âgée de quelques millions d’années, Bételgeuse connaîtra d’ici à quelques milliers d’années, peut-être moins, la fin spectaculaire des étoiles massives. Nous pourrons peut-être même assister à cette fin… d’où notre surveillance très étroite des variations d’éclat de cette étoile… Bételgeuse est de couleur orangée-rouge (température en surface 3 500 °C) et se voit facilement à l’œil nu, en haut à gauche de la constellation d’Orion.
Cette fin spectaculaire, c’est l’explosion de l’étoile en supernova ! Elle se produit au moment où l’étoile termine l’étape de fusion qui produit du fer : or, le fer ne peut pas fusionner ! L’équilibre interne de l’étoile se rompt subitement, elle s’effondre sur elle-même. Ses couches externes heurtent violemment le cœur et sont expulsées à la vitesse faramineuse de 70 millions de km/h ! L’énergie libérée accroît subitement la luminosité, celle-ci déclinera ensuite en quelques mois. De cette fin cataclysmique, il reste alors les débris de l’étoile qui se répandent dans l’espace : le rémanent de supernova, ainsi qu’une étoile à neutrons tournant très rapidement sur elle-même, qui est tout ce qu’il reste du cœur.
Dans la constellation du Taureau se trouve justement l’un de ces vestiges stellaires : M1, la nébuleuse du Crabe, dont l’histoire est passionnante. La supernova qui en est à l’origine a explosé en 1054 et plusieurs récits anciens évoquent qu’il a été possible de voir l’éclat de l’étoile mourante en plein jour durant plusieurs semaines !
En observant M1, vous regardez donc les vestiges d’un cataclysme cosmique qui a été observé et répertorié par les hommes il y a presque un millénaire, ce qui n’est pas très courant ! Pour localiser cette nébuleuse, aidez-vous de la carte ci-dessous.
C’est l’objet le plus difficile à observer de notre randonnée car si une lunette de 60 mm de diamètre est suffisant pour la voir, il faut un ciel bien noir. Les filaments caractéristiques de l’explosion et qui apparaissent bien sur les images sont difficiles à percevoir visuellement (il faut un gros télescope pour y parvenir) mais une petite lunette ou un modeste télescope montrent tout de même la nébuleuse ovale.
Enfin, dans le cas où l’étoile à neutrons résultant de la supernova fait plus de 3,2 masses solaires, une dernière étape est franchie : trop dense, elle s’effondre sur elle-même et engendre un trou noir. Aucune matière, aucun rayonnement, aucune lumière ne peut échapper à l’attraction de cet objet, ce qui le rend totalement invisible à nos yeux. Cet objet là, vous n’aurez d’autre choix que de l’imaginer !
Pour en savoir plus sur le destin des étoiles, lisez aussi notre dossier Les étoiles : comment elles naissent, vivent et meurent.
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